Trump, Netanyahou, et le retour du feu sur Gaza : la paix impossible d’un plan bancal

Trump, Netanyahou, et le retour du feu sur Gaza : la paix impossible d’un plan bancal

Photograph: EPA

International

Le cessez-le-feu n’aura tenu que quelques jours. AprĂšs l’échec de la restitution des dĂ©pouilles d’otages et la colĂšre des familles israĂ©liennes, Benyamin Netanyahou a ordonnĂ© de nouvelles frappes sur Gaza, remettant en cause la premiĂšre phase du plan de paix amĂ©ricain.


Oscar Tessonneau


6 Novembre 2025

C’est un tournant diplomatique majeur. Les États-Unis ne bloqueront plus les rĂ©solutions Ă©voquant les violations du droit international commises par l’État hĂ©breu pendant la guerre dans l’enclave palestinienne. Dans un article paru le 6 novembre, le journaliste du Monde Philippe Ricard Ă©crit que les AmĂ©ricains ont acceptĂ© de « tenir la plume » du texte afin de donner un cadre juridique et institutionnel au plan Trump.

 À quoi correspond-il ? Dans sa premiĂšre phase, rappellent les journalistes de The Economist du 9 octobre 2025 dans Israel and Hamas agree to the first phase of Donald Trump’s peace plan, « le Hamas devait libĂ©rer vingt otages vivants et restituer vingt-huit corps de captifs dĂ©cĂ©dĂ©s ». Quant Ă  l’armĂ©e israĂ©lienne, l’IDF, elle s’engageait Ă  un « retrait partiel de Gaza, tout en continuant d’occuper environ la moitiĂ© de l’enclave ». Cette Ă©tape, selon le journal britannique, devait ĂȘtre « la plus simple du plan Trump ». Une deuxiĂšme phase prĂ©voyait « le dĂ©sarmement du Hamas et la crĂ©ation d’une autoritĂ© transitoire pour gouverner Gaza ». La formation de ce gouvernement est une exigence formulĂ©e depuis des mois par de nombreux pays arabo-musulmans.

 L’IndonĂ©sie s’est dite complĂštement prĂȘte Ă  fournir des troupes. Ce choix, explique Philippe Ricard, a Ă©tĂ© plutĂŽt bien accueilli par les quinze membres du Conseil de sĂ©curitĂ©, mĂȘme si le texte reste en discussion aprĂšs des consultations prĂ©liminaires intenses. « Nous voulons jouer un rĂŽle constructif sur ce projet de rĂ©solution », a dĂ©clarĂ© au Monde Pascal Confavreux.

Le porte-parole du Quai d’Orsay rappelle que « le texte doit encore ĂȘtre discutĂ© » et que la France restera « extrĂȘmement vigilante ». Elle prendra en compte les positions de l’ensemble des pays arabes voisins. Le conseiller de Jean-NoĂ«l Barrot note toutefois que le projet amĂ©ricain ne mentionne Ă  aucun moment la solution Ă  deux États, pourtant considĂ©rĂ©e comme la base historique de toute perspective de paix. 

DĂšs le dĂ©part, la fragilitĂ© du texte Ă©tait inscrite dans ses zones d’ombre : « Son langage vague suffisait Ă  gĂ©nĂ©rer la peur que les futurs retraits ne se produisent jamais », Ă©crivent les journalistes de The Economist. Ils notent que « Benyamin Netanyahou affirmait qu’IsraĂ«l resterait profondĂ©ment installĂ© dans la bande de Gaza pour l’avenir prĂ©visible ». Pour toutes ces raisons, dans les capitales arabes, la lassitude se mĂȘlait Ă  la peur.

Des consensus opaques

The Economist souligne que « les pays du Golfe, bien qu’engagĂ©s Ă  financer la reconstruction de Gaza, hĂ©sitent Ă  investir si leurs projets risquent d’ĂȘtre dĂ©truits par une future guerre ». MĂȘme la mise en place d’une force de paix, censĂ©e stabiliser la rĂ©gion, reste hypothĂ©tique : « La Turquie s’est dite prĂȘte Ă  y participer, mais aucun État arabe n’a encore signĂ© », ajoute l’hebdomadaire britannique. Ainsi, la promesse d’un processus en deux phases, imaginĂ© par Trump comme une dĂ©monstration de pragmatisme, s’est transformĂ©e en un engrenage sans fin. The Economist Ă©crit encore que « le plan de paix de Trump reposait sur des standards, des jalons et des dĂ©lais liĂ©s Ă  la dĂ©militarisation ».

Philippe Ricard souligne que le texte prĂ©voit une coopĂ©ration Ă©troite entre la force internationale, IsraĂ«l et l’Égypte, notamment pour la stabilisation sĂ©curitaire de Gaza et la prĂ©vention de la reconstitution d’infrastructures militaires dans l’enclave. « Il s’agit de mener la destruction et de prĂ©venir la reconstitution d’une infrastructure militaire et terroriste offensive, ainsi que le dĂ©mantĂšlement permanent des armes des groupes armĂ©s non Ă©tatiques », peut-on lire dans le document.

 L’auteur note que cette clause, reprise mot pour mot du plan Trump, est jugĂ©e trĂšs ambitieuse, voire irrĂ©aliste, compte tenu de la situation actuelle du territoire. Le Hamas, bien qu’affaibli, n’a pas Ă©tĂ© anĂ©anti aprĂšs le conflit. De plus, ce projet assigne Ă©galement Ă  la mission la sĂ©curisation des frontiĂšres, la protection des civils, le soutien Ă  l’aide humanitaire et la formation d’une nouvelle police palestinienne censĂ©e remplacer celle, aujourd’hui dissoute, du Hamas. The Economist rapporte que « les dirigeants du Hamas ont eu du mal Ă  dĂ©cider ce qu’ils Ă©taient prĂȘts Ă  accepter », contrairement Ă  la « prĂ©sidence centralisĂ©e de l’AutoritĂ© palestinienne ».

Le mouvement terroriste fonctionne par consensus, Ă©clatĂ© entre ses diffĂ©rentes branches. Parmi elles, on peut citer les combattants, les dirigeants en exil, les rĂ©seaux de Cisjordanie ou les cellules de prisonniers. Elles sont minĂ©es par les rivalitĂ©s de leurs parrains en Iran, au Qatar et en Turquie. « Les messages peuvent mettre des semaines Ă  voyager des tunnels de Gaza aux tours de Doha et d’Istanbul », note The Economist. Le journal anglais dĂ©crit un appareil politique mis en charpie par des mois de guerre.

Un plan bancal

Les pays arabes, qui pourraient ĂȘtre appelĂ©s Ă  fournir des contingents, exigent des clarifications avant tout engagement. Ils demandent que ces forces soient acceptĂ©es par les deux parties, israĂ©lienne et palestinienne, et non imposĂ©es unilatĂ©ralement Ă  l’un des deux peuples payant les consĂ©quences de cette guerre. Philippe Ricard souligne que les EuropĂ©ens, eux, se montrent attentifs mais discrets, Ă©vitant de commenter publiquement pour ne pas irriter Washington. 

Le texte reste Ă©galement flou sur le financement des opĂ©rations de reconstruction. La contribution amĂ©ricaine n’est pas chiffrĂ©e. Quant aux États du Golfe, notamment l’Arabie saoudite, ils devraient supporter l’essentiel du coĂ»t de la mission. À cette fragmentation s’ajoute l’élimination progressive des cadres du Hamas. Exsangue, le mouvement disposerait, selon The Economist, d’environ « dix mille combattants opĂ©rationnels selon les renseignements israĂ©liens, dont deux mille membres des forces Nukhba retranchĂ©s dans Gaza City ».

Plus de la moitiĂ© de ses troupes ont Ă©tĂ© tuĂ©es, tandis que les nouvelles tactiques de l’armĂ©e israĂ©lienne — « vĂ©hicules tĂ©lĂ©commandĂ©s bourrĂ©s d’explosifs et drones de reconnaissance » — achĂšvent de bouleverser des nĂ©gociations tournant plus qu’au ralenti. The Economist dĂ©crit un « plan bancal, scindĂ© en deux phases mal articulĂ©es ». Il n’apporterait aucune garantie que la bande de Gaza serait rapidement reconstruite. The Economist note qu’en fĂ©vrier, « la Banque mondiale avait estimĂ© le coĂ»t de la reconstruction Ă  53 milliards de dollars », mais que « les États du Golfe, bien qu’engagĂ©s Ă  financer les travaux, restent rĂ©ticents Ă  investir dans une zone oĂč tout peut ĂȘtre rĂ©duit en cendres Ă  la prochaine guerre ».

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