Quand une quĂȘte de vĂ©ritĂ©  se heurte Ă  la science

Quand une quĂȘte de vĂ©ritĂ© se heurte Ă  la science

À la lisiĂšre du monde scientifique et des forums en ligne, un nombre croissant de Français, autistes ou non, déçus par les rĂ©ponses institutionnelles et leur isolement social, se tournent vers des thĂ©ories complotistes. Comme l’écrit l’essayiste Laurent Foiry dans Les faux savants, cette tendance inquiĂ©tante rĂ©vĂšle autant de mĂ©fiance envers le systĂšme de santĂ© que de profonds malentendus sur la science.

Par Oscar Tessonneau

C’est une Ă©trange comĂ©die humaine qui se joue dans les groupes en ligne oĂč, entre thĂ©ories contestataires et faux experts, le doute rĂšgne. Nombreux sont ceux qui, parfois aprĂšs des annĂ©es d’errance mĂ©dicale, de traitements lourds, Ă  base d’antidĂ©presseurs voire d’antipsychotiques, Ă©chouent ici, au cƓur d’une sphĂšre oĂč l’on promet des rĂ©ponses « alternatives » Ă  la mĂ©decine ordinaire, qualifiĂ©e de validiste.

Dans Les faux savants, Laurent Foiry Ă©crit que ce qui frappe dans cette communautĂ© – un phĂ©nomĂšne qu’on retrouve aussi dans l’excellent portrait que Nora Bussigny fait de l’autisme dans Les Nouveaux Inquisiteurs – c’est l’incapacitĂ© Ă  intĂ©grer les discours de ceux qui, pourtant experts en biologie, tentent d’établir le dialogue. Pour les complotistes, « la science officielle » est perçue comme une menace, un instrument d’oppression qui leur aurait confisquĂ© le pouvoir d’agir sur leur propre santĂ©.

Un rejet de l’autre

Les traitements comme la quĂ©tiapine ou la rispĂ©ridone, encore prescrits Ă  beaucoup d’autistes, nourrissent un ressentiment partagĂ© et ce dĂ©sir de trouver « ailleurs » des rĂ©ponses que les mĂ©decins ne leur ont jamais fournies. Dans Les faux savants, Foiry Ă©crit que le scepticisme y est si rĂ©pandu qu’aucune certification, aucun diplĂŽme ne peut convaincre les membres.

Ce sont les failles supposĂ©es des experts qui, paradoxalement, viennent renforcer la croyance du groupe en leur propre savoir. L’auteur souligne que cette exclusion systĂ©matique de toute contradiction renforce le pouvoir de ceux qu’il appelle les « animateurs » du complot. Ces figures, sans rĂ©elle maĂźtrise des connaissances en psychiatrie, virologie ou biologie, imposent nĂ©anmoins leur discours avec un aplomb remarquable. Selon Foiry, les questions du groupe ne visent pas la comprĂ©hension, mais la dĂ©stabilisation, la validation de leur propre position.

Le scepticisme n’est plus une dĂ©marche critique, mais une arme de rejet total de l’autre, une façon de « rĂ©vĂ©ler » la prĂ©tendue faiblesse des scientifiques, d’exposer leur ignorance aux yeux des autres.

Des vérités difficiles à entendre

Dans Les faux savants, Laurent Foiry analyse cette rencontre singuliĂšre : face Ă  l’idĂ©ologie rigide d’un groupe qui nie la rĂ©alitĂ© des virus et des germes, une personne aura du mal Ă  Ă©branler les certitudes Ă©tablies.

Foiry Ă©crit que dans ces groupes, la moindre mention de contagion, de microbes ou de traitements antiseptiques peut dĂ©clencher une rĂ©action violente, comme si admettre la possibilitĂ© d’une contagion Ă©tait dĂ©jĂ  une trahison du dogme. L’animateur, que Foiry cite dans son ouvrage, dĂ©ploie alors son mode de dĂ©fense prĂ©fĂ©rĂ© : il attaque frontalement, renverse les rĂŽles et accuse le nouvel arrivant de semer le trouble.

Il Ă©carte le sujet avec autoritĂ©, affirmant d’un ton pĂ©remptoire que « les virus n’existent pas » et qu’« il n’y a aucune preuve de contagion ».

Laurent Foiry, dans Les faux savants, relĂšve combien ce tĂ©moignage d’une « confrontation avec la vraie vie » rĂ©vĂšle l’incompatibilitĂ© entre la doctrine rigide de la communautĂ© et les observations concrĂštes des Ă©leveurs. Ce rĂ©cit, brutal et prĂ©cis, expose une fragilitĂ© dans les croyances du groupe.

Ce qui peut ĂȘtre perçu comme une Ă©vidence incontestable – l’inexistence des microbes – commence Ă  se fissurer, comme l’explique Foiry, sous les rĂ©cits de ces Ă©leveurs, qui observent des symptĂŽmes inexplicables chez leurs animaux en l’absence de tout traitement prĂ©ventif.

Foiry en vient à conclure que dans ce type de groupes, ceux qui continuent de défendre une approche plus ouverte, plus proche du terrain, sont peu à peu évincés, la majorité des participants étant habitués à accepter les idées de la communauté sans remise en question.

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