Progressivement, Spinoza nous apprend à vivre en paix avec nous-mêmes

Progressivement, Spinoza nous apprend à vivre en paix avec nous-mêmes

Progressivement, Spinoza nous aide à devenir heureux

Dans un monde où la recherche du bonheur oscille entre injonctions individualistes et aspirations collectives, Spinoza reste un phare intemporel.

Oscar Tessonneau

Il y a dans la quête du bonheur quelque chose d’universel et d’éminemment fragile, une recherche constante de ce que Spinoza appelle la contagion émotionnelle. Thomas Jolly, qui a été mis en difficulté par une extrême droite haineuse après la cérémonie des Jeux Olympiques, le disait jeudi dans Le Nouvel Obs. « Le théâtre est toujours là parce qu’il nous rappelle que nous sommes tous vivants au même endroit en même temps. » Cette synchronisation, qu’elle soit individuelle ou sociale, illustre parfaitement la thèse spinoziste selon laquelle nos affects ne naissent pas dans un vide, mais se construisent dans ce que les autistes détestent souvent : les interactions. Cette dynamique collective reste et restera un levier puissant pour transformer nos émotions.

 

Pour Spinoza, les désirs, même les plus primaires, ne sont ni bons ni mauvais en eux-mêmes. Ils deviennent des outils d’émancipation sociale ou des chaînes oppressives selon notre degré de compréhension de leur origine. Dans cette vision, la morale n’est pas une série de règles extérieures imposées à l’individu, mais un cheminement intérieur où le bonheur joue un rôle fondamental. La vertu n’est pas une contrainte, mais une expression de la joie : c’est parce que nous sommes pleinement en accord avec la société dans laquelle nous vivons que nous pouvons transcender nos instincts et orienter nos actions vers le bien.

En comprenant comment nos émotions se propagent, nous pouvons commencer à les maîtriser, à les orienter vers des formes plus élevées de joie, que beaucoup d’autistes ne connaissent pas lorsqu’on les juge trop ingérables pour vivre avec les autres. « Nous aimons souvent ce qui ressemble à ce que nous avons aimé jadis, mais ces ressemblances touchent rarement les points décisifs de notre expérience passée, » écrit Balthasar Thomass dans son essai Être heureux avec Spinoza. Cette confusion entre ressemblance et réalité est à l’origine de bien des désillusions, et même d’une idéologie politique défendue par ceux qui ont insulté Thomas Jolly depuis plusieurs mois : le conservatisme. Dès le XVIIe siècle, Spinoza avait identifié ce piège émotionnel. Par exemple, nous pouvons aimer une personne parce qu’elle évoque une sorte de madeleine de Proust. Ce lien est souvent illusoire, car il ne repose pas sur les qualités essentielles de l’autre, mais sur un souvenir d’une ancienne France, que Thomas Jolly a voulu nous faire oublier en montrant des drag-queens ou les autistes du Papotin pendant les Jeux Olympiques.

 Ainsi, Spinoza nous invite à observer nos affects non comme des mystères insondables, mais comme des mécanismes rigoureusement logiques, obéissant à des lois aussi prévisibles que celles de la physique. Dans Être heureux avec Spinoza, Balthasar Thomass explore cette mécanique émotionnelle et met en lumière nos errances affectives les plus courantes. « Nos passions, écrit Thomass, s’enchaînent les unes aux autres, se transfèrent, se métamorphosent, souvent sans que nous en ayons conscience. » Ce constat pourrait être accablant s’il ne contenait une promesse d’émancipation : comprendre nos passions en comprenant leur impact social, c’est déjà commencer à les maîtriser. 

En écho à cette lucidité spinoziste, Thomas Jolly souligne l’importance d’un espace commun pour dépasser ces tiraillements, comme les théâtres ou les Jeux Olympiques. « Le théâtre, indiquait-il dans un entretien au Nouvel Obs, est un lieu où les émotions se synchronisent, où l’on se rappelle que nous sommes vivants ensembles. » Cette synchronisation, où les affects individuels se transforment en une expérience sociale, collective et politique, rejoint l’idéal spinoziste d’une joie partagée, fondée sur une compréhension commune des mécanismes émotionnels. Ainsi, Spinoza ne nous invite pas à fuir nos passions, mais à les regarder en face, à en comprendre les ressorts pour les intégrer dans une dynamique de liberté. Thomass résume ainsi la démarche spinoziste : « Apprendre à discerner le vrai du faux dans nos affects, c’est ouvrir la voie à une joie plus authentique, libérée des illusions et des contradictions. » Cette quête de clarté n’est pas seulement un chemin vers le bonheur individuel, mais une clé pour une coexistence plus harmonieuse avec autrui.

 

 

Article rédigé par Oscar Tessonneau. Pour en savoir plus, visitez Le Nouvel Observateur.

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