En vert et contre tous, la pastèque Insoumise reste rouge de colère

En vert et contre tous, la pastèque Insoumise reste rouge de colère




France 

 Johann Carta, qui se présente comme le président actuel du club de foot a été lui aussi mis en examen tard dans la nuit et incarcéré à la suite de son audition par un juge des libertés et de la détention.

À Châteauneuf-sur-Isère, le fondateur de La France Insoumise a imposé une rentrée sous tension. En conflit avec les médias comme peut l’être le président américain, son mouvement revendique la solitude.

Oscar Tessonneau


23 Août 2025

Une chose reste indéniable: le score des Insoumis aux dernières présidentielles ( 22%) a eu un impact positif sur ceux de leurs alliés électoraux.  En 2025, qui sont ces alliés contre qui Les Insoumis sont en colère? Restent-ils dans les partis composant La Nupes? Peut-être.  À Châteauneuf-sur-Isère, le nombre d'élus représentant des partis profitant de leurs succès, construits autour d'un programme avec des mesures sociales ambitieuses, comme la hausse des budgets dédiés à la protection de l'enfance, les 32 heures, à l'hébergement d'urgence, ou l'indexation de l'allocation adulte handicapé (AAH) sur l'inflation rejetée par d'autres organisations de la droite et du centre, était faible. " J'en ai assez d'entendre les leçons de morale de Marianne Maximi sur notre gestion de la petite enfance." confiait une ministre de Michel Barnier quelques jours avant la censure. Seules deux figures extérieures, Sandrine Rousseau et Benjamin Lucas, étaient présentes. Jadis, socialistes, communistes et écologistes venaient nombreux aux Amfis. Au fil des jours, la meute s'organise contre ses adversaires. En bon chef de troupe, l'ancien sénateur de L'Essonne, qui a paradoxalement porté des mesures sociales et écologiques pouvant changer la vie des Français, a trouvé sa nouvelle cible : les médias progressistes. Il y a quelques heures, une  journaliste politique nous confiait que "la presse progressiste ne peut pas adopter la même posture que Frontières ou Valeurs Actuelles. Elle  n'est pas une presse d'opinion et reste indépendante des partis. Rappelons-nous que Caroline Parmentier faisait des éloges dithyrambiques à Jordan Florentin il y a quelques semaines. "


Le journaliste du quotidien progressiste Le Monde Olivier Pérou en fait les frais. Auteur de La Meute, il s’est vu retirer son accréditation. Quant à celle de Libération, Charlotte Belaïch, elle est restée à Paris. Son confrère Sacha Nelken a été envoyé par le service politique de Libération sur place, pour couvrir l’évènement. À quelques centaines de kilomètres, aux universités d’été des écologistes de Strasbourg, toutes les discussions tournent autour des Insoumis. « Ils nous font du trumpisme de gauche » confiera l’un des rubricards présents sur place en salle de presse.

 Le chef des Insoumis a-t-il trouvé sa Laura Loomer et sa Pam Bondi, aptes à le défendre bec et ongle face à la justice et aux médias dominants ? L’analogie reste difficile, puisque le clan Mélenchon ne gouverne pas. Dans La Meute, Charlotte Belaïch et Olivier Pérou précisent qu’il est constitué depuis une dizaine d’années. Dès 2017, Mélenchon réunissait ses lieutenants dans un bistrot du 10e arrondissement. L’Escalier est choisi pour sa proximité avec son domicile et la complicité du patron qui fermait les portes aux curieux. Là, sur la mezzanine, autour de Manuel Bompard, Sophia Chikirou, Bastien Lachaud ou Alexis Corbière, le chef tranchait les questions politiques et financières sans contradicteurs extérieurs.

« On suit ou on ferme sa gueule », écrivent Belaïch et Pérou pour résumer la règle. Cette méthode du cercle restreint irrigue la logique municipale actuelle : la direction de LFI veut présenter des candidats partout, quitte à se mettre à dos ses militants montpelliérains. Ces derniers ont boudé la députée Nathalie Oziol. Le politiste Rémi Lefebvre confie au Monde que « la direction nationale va vouloir imposer sa stratégie d’en haut, mais des groupes locaux expriment déjà des désaccords ». Il ajoute qu’un « réflexe légitimiste » pousse nombre de militants à refuser de faire perdre une mairie de gauche, en défendant une liste d’union avec Les Écologistes et Les Socialistes. Dans La Meute, Olivier Pérou écrit que cette confrontation entre stratégie nationale et ancrages locaux a été structurée comme une partition écrite sur du papier à musique.


Les gendres idéaux

Dans La Meute, Belaïch et Pérou racontent comment le chef a dû trancher les guerres picrocholines entre ses soldats. La rivalité entre les deux lillois Adrien Quatennens et Ugo Bernalicis existe. Si Bernalicis, décrit par Alexis Corbière comme « le gentil garçon qui adore jouer à la console », déçoit par son manque de sérieux, Quatennens devient le lieutenant modèle, patientant dans l’attente de l’héritage, au point de se fabriquer un photomontage vieilli de lui avec la devise de Mélenchon, « Faites mieux », et la date 2027. Cette obsession présidentielle, doublée d’un encadrement de jeunes diplômés de Sciences Po obsédés, déconnectés du monde du travail, comme le résume l’ex-spin doctor Laurent Matejko cité dans La Meute, reflète la même mécanique : une cour sans contradicteurs, où l’isolement devient protection et moteur.

 « Je suis farouchement opposé au développement des Sasu et des auto-entreprises. Je défends un monde du travail où les salariés ont plus de droits » confiait à la rédaction un militant Insoumis du 14e arrondissement lors des élections législatives de 2024. La mise en scène de la solitude stratégique trouve son écho dans la présidentielle. Hormis Place Publique, tous les partis de l’ex-Nupes se lancent dans une primaire. LFI affiche son refus du compromis, préférant tester son rapport de force partout, même au prix de défaites locales. « Deux animaux rares », ironise Benjamin Lucas dans Le Monde, pour qualifier sa présence et celle de Rousseau aux Amfis.

Le constat de Lucas est aussi clair qu'ironique. Jean-Luc Mélenchon cultive une marginalité voulue, héritée des réunions clandestines de l’Escalier, prolongée dans les trajets nocturnes vers le Loiret, où Sébastien Delogu, chauffeur et futur député, conduisait en silence le chef et Sophia Chikirou dans une voiture close, vers une maison vandalisée au début de l’année 2025. Cette solitude, écrivent Pérou et Belaïch, résonne comme un prolongement de la vie politique du chef. Lorsqu’il était ministre en charge de la formation professionnelle à la fin des années 90, Jean-Luc Mélenchon a fait un voyage en Chine. Il aurait été totalement fasciné par le fonctionnement du Parti communiste, où tous les militants sont féodés au chef. Les jeunes figures Insoumises n’ayant jamais mis les pieds dans le secteur privé sont façonnées par ce système. L’exemple de Quatennens, ce « gendre idéal », montre combien la stratégie fonctionne bien.

Des apôtres interchangeables

Dans ce moment de sidération, une partie des Insoumis se tait. D’autres, plus féministes, grincent des dents. Dans son entourage, il répète qu’après la parution de la tribune du Monde, « Adrien est victime d’une cabale ». L’opération de sauvetage est renforcée par des relais externes. Dans une longue enquête sur des militants poitevins, Mathieu Dejean, journaliste à Mediapart, révèle que le Parti ouvrier indépendant (POI), ce mouvement trotskiste discret mais fidèle, multiplie les tribunes.

 Dans sa publication Informations ouvrières, il compare Adrien Quatennens au « Jean Valjean de Victor Hugo [qui] pour un pain volé est envoyé au bagne », et accuse « les médias des milliardaires » de vouloir détruire un soldat de la cause. La plume de Michel Sérac, vieil ami du chef jadis trosko-lambertiste, sonne l’appel au retour : « Adrien, reviens, la classe ouvrière a besoin de toi ».

Le 7 février 2023, moins de cinq mois après sa mise en retrait, Quatennens réapparaît à l’Assemblée nationale. L’image frappe : devant une majorité de députés Insoumis mal à l’aise, il pose sa première question orale sous les huées venues des autres bancs. Quelques fidèles, Sophia Chikirou, Sébastien Delogu, Nathalie Oziol, se lèvent pour l’applaudir, comme un rempart dérisoire face au désaveu général. La réhabilitation, voulue par Mélenchon, échoue rapidement. Est-ce un problème ? Pas forcément. Chez les Insoumis, écrit La Meute, « Mélenchon n’a jamais voulu de barons indétrônables ». À Lille comme à Marseille, le système se répète : il n’y a que des apôtres interchangeables, dévoués à l’homme, non à une ligne

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