Baisse de TVA : Entre Réalité et Illusions

Baisse de TVA : Entre Réalité et Illusions

Depuis 2011, la TVA, ou taxe sur la valeur ajoutée, est un impôt harmonisé au niveau européen. Il permet d'assurer une uniformité fiscale entre les états sur laquelle Jordan Bardella souhaite revenir. Le président du Rassemblement national (RN), a récemment proposé de réduire la TVA sur les carburants de 20 % à 5,5 %.

Oscar Tessonneau

Règles communes

La TVA est un impôt européen harmonisé à travers des directives successives, notamment celle du 28 novembre 2006. Initialement, le mécanisme prévu par la TVA exigeait la taxation dans l'État où est établi le concepteur du produit. Ce mécanisme visait à taxer les biens et services aux frontières du pays d'origine afin que les états produisent plus rapidement un produit concurrent, voire meilleur et moins cher. Cependant, cet objectif a évolué. La Commission européenne, dans une communication du 6 décembre 2011 a constaté que cet objectif n'était plus d'actualité. Elle a proposé de pérenniser le principe de l'imposition dans l'État de destination où sera acquis le produit, afin de favoriser le développement du libre-échange sur le continent européen, et d’avoir des acteurs économiques dans des secteurs comme l’industrie pharmaceutique, l’automobile ou les télécommunications qui puissent rivaliser avec leurs concurrents asiatiques ou nord-américains, sur un marché comprenant plus de 28 états, analysé dans le dernier rapport d'Enrico Letta. 

Ainsi, le 25 mai 2018, la Commission a présenté cette proposition de directive prévoyant la mise en place d'un système de TVA définitif pour les échanges intra-communautaires de biens entre assujettis. Pour présenter cette mesure, les auteurs du manuel de droit Memento TVA 2024-2025 écrivent : « Sont notamment prévus l'institution du statut d'assujetti certifié, le concept et les règles d'imposition de la livraison intra-Union de biens, et l'extension du guichet unique à toutes les opérations des assujettis non établis dans l'État d'imposition ».

Mensonge

Les propositions de Jordan Bardella, président du Rassemblement national, consistant à réduire la TVA sur les carburants de 20 % à 5,5 %, avec une baisse de la contribution française au budget européen, se heurtent à des réalités juridiques, commerciales et pratiques qui impacteront les activités des entreprises françaises. Les auteurs du manuel Mémento TVA 2024-2025 rappelle que « la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 fait l’objet d’un règlement d’application, qui est juridiquement contraignant et directement applicable dans tout État membre ». Cela signifie que les règles de TVA sont communes à l’ensemble des pays des 28. Toute dérogation à ces règles, comme celle demandée par la Pologne en 2022, lorsqu’elle a obtenu une dérogation pour réduire la TVA sur le diesel et les carburants, sont temporaires. La semaine dernière, des journalistes du Monde rapportaient que cette mesure n’est plus en vigueur depuis juillet de la même année, soulignant les difficultés d’une telle réforme. Pour montrer la difficulté d’application de cette réduction de TVA, le premier ministre Gabriel Attal, a souligné lors d’un débat télévisé que cette proposition pourrait engendrer un manque à gagner de 16,8 milliards d’euros pour les finances publiques françaises.

Ainsi, les complexités et les défis politiques et économiques de la gestion de la TVA en Europe montrent clairement que les promesses électorales de réduction significative de cette taxe nécessitent des révisions majeures des directives européennes, un processus loin d'être simple ou rapide.

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