Attal perd son sang-froid

Attal perd son sang-froid

« Écraser les gens est devenu ton passe-temps. En les éclaboussant, tu deviens gênant. » Extraits du célèbre tube du groupe Trust, Antisocial, ces vers illustrent comment la réforme de l'ASS pourrait considérablement modifier les dispositifs de réinsertion professionnelle proposés aux demandeurs d'emploi qui basculeront vers le RSA ou l'AAH s'ils ne retrouvent pas d'emploi.

Oscar Tessonneau

Ils vont trinquer !

On connaît maintenant le refrain par cœur, comme une chanson d’Aya Nakamura que des étudiants hurlent sur un dancefloor endiablé : « Bercy et Matignon veulent réduire les aides sociales pour ramener les Français vers le chemin de l’emploi. » Même Laure Albertini, conseillère politiques inclusives à délégation interministérielle Autisme, s’était prêté au jeu lors d’une conférence autour de l’autisme et de l’emploi en novembre 2023, en indiquant que s’ils veulent trouver du travail, la première chose que doivent faire les autistes est de s’inscrire dans leur agence Pôle Emploi. Mais à quel prix ? La suppression de l'Allocation de Solidarité Spécifique (ASS), analysée hier par le groupe socialiste au Palais Bourbon, dans une note publiée par la Fondation Jean-Jaurès, montre que ces choix sociaux ne seront pas sans conséquence, selon Arthur Delaporte et Boris Vallaud, président du groupe Socialiste à l'Assemblée. Dans leurs notes, ces héritiers de Michel Rocard, inventeur du RMI, qui deviendra par la suite le RSA (Revenu de Solidarité Active), mettent en lumière les conséquences d'une décision prise dans les hautes sphères du pouvoir.

Comment toucher L’ASS ?

Pour prétendre à cette aide, les demandeurs d'emploi doivent naviguer dans un labyrinthe bureaucratique et déposer leur demande auprès de leur conseiller Pôle Emploi dans un délai strict de deux ans après avoir rempli les conditions requises, sans le moindre délai d'attente. Cette allocation, versée mensuellement et renouvelable tous les six mois, est censée être un filet de sécurité pour ceux ayant épuisé leurs droits à l'assurance chômage. « C'est un parcours du combattant, chaque étape est une bataille, » confie Jeanne, 49 ans, ancienne assistante de direction en situation de handicap, ayant déjà fait ses demandes d’allocation adulte handicapé (AAH), auprès de sa maison départementale du handicap (MDPH), si elle ne retrouve pas d’emploi adapté à ses troubles dys et de l’humeur. Comme elle, ils sont nombreux à devoir prouver, mois après mois, qu'ils remplissent encore les conditions d'admissibilité à l’ASS, sous peine de voir leurs maigres revenus s'évaporer du jour au lendemain. Les règles de "recharge" des droits à l'indemnisation ajoutent une couche supplémentaire de complexité, permettant aux salariés reprenant un emploi de retrouver leurs droits non épuisés en cas de nouvelle perte d'emploi, mais les conditions sont strictes et les délais, impitoyables. « Quand j'ai perdu mon emploi après une courte mission, j'ai dû me battre pour faire valoir mes droits rechargeables. J'avais l'impression de devoir prouver que je méritais cette aide, » raconte Marc, 54 ans, licencié pour harcèlement lorsque sa dyslexie le mettait en difficulté pour rédiger des mails et prendre la parole en public.

Sauvez-nous !

Actuellement, l’ASS est une bouée de sauvetage pour des salariés ayant épuisé leurs droits à l'assurance chômage. « C'est une allocation essentielle, elle permet de garder la tête hors de l'eau, » explique une bénéficiaire en situation de handicap mental, la voix chargée d'émotion, dans un témoignage qui résonne comme un cri du cœur. Mais ce sont peut-être les simulations réalisées avec le simulateur LexImpact qui peignent le tableau le plus poignant. Elles montrent que, pour beaucoup, la bascule vers le RSA ou l’Allocation Adulte Handicapé (AAH) ne sera pas juste une transition administrative mais un véritable coup porté à leur survie financière. « On parle de pertes allant jusqu'à 140 euros par mois, pour certains, » précise Delaporte, chiffres à l'appui, révélant l'ampleur de ce que certains appellent déjà un « séisme social ». La note, de plus, ne se contente pas de dresser un état des lieux mais propose des pistes pour un meilleur accompagnement des demandeurs d'emploi de longue durée. « Il ne s'agit pas juste de donner une allocation, mais de fournir un véritable soutien, » conclut Vallaud, en soulignant le fait que ces salariés, souffrant du manque d’attractivité du marché de l’emploi français, craignent detoucher le Revenu de Solidarité Active (RSA) ou l’AAH (Allocation Adulte Handicapé), dans un pays comptant 17 millions de personnes handicapées.

« Ce n'est pas possible, même mon fils de 8 ans fait moins de fautes que vous ! »

Dans un contexte où les réformes sociales s'enchaînent avec une rigueur parfois implacable, la proposition du Premier ministre Gabriel Attal de basculer les bénéficiaires de l'Allocation de Solidarité Spécifique (ASS) vers le Revenu de Solidarité Active (RSA) sème l'inquiétude parmi les travailleurs précaires. Cette réforme, annoncée comme une mesure contre les "trappes à inactivité", pourrait marquer un tournant dans la politique sociale française, désormais axée sur l'idée que la retraite doit être le fruit du travail. « Je comprends l'intention, mais passer de l'ASS au RSA, c'est me mettre plus en difficulté pour obtenir mes trente-huit annuités, » témoigne avec amertume Claire, ancienne employée de commerce de 58 ans, qui a basculé dans le chômage tard dans sa carrière. Comme Marc, Claire est très dyslexique. Elle redoute le harcèlement de nouveaux managers peu indulgents face à ses difficultés. « On nous pousse à accepter n'importe quel emploi, peu importe les conditions. Comment vais-je faire si un futur manager sur une mission courte me dit « Ce n'est pas possible, même mon fils de 8 ans fait moins de fautes que vous » ? » ajoute-elle, soulignant son stress à l'idée de basculer vers le RSA à la fin de sa carrière. Ainsi, ces allocataires, loin d'être de simples statistiques, vivent au quotidien les conséquences des politiques sociales du gouvernement.

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