Ils attendent le grand soir

Ils attendent le grand soir

Fâchés avec la justice et les fondamentaux de l'Etat de droit, Donald Trump et Benyamin Netanyahou pourraient s'allier afin de développer une diplomatie plus transactionnelle si le candidat républicain était amené à gagner les présidentielles américaines en novembre. Ils attendent le grand soir. 

Oscar Tessonneau

Une diplomatie transactionnelle

C'est un mandat présidentiel que tous les progressistes aimeraient oublier. Celui d'un homme nommé Donald Trump. Entre 2016 et 2020, les relations entre les diplomaties israélo-américaines, souvent qualifiées de « transactionnelles », ont été marquées par la signature des accords d'Abraham, visant à normaliser les relations entre les deux pays. Jacques Bendelac, dans un essai intitulé Les années Netanyahou: Le grand virage d'Israël, met en lumière un aspect crucial de cette époque : "les allègements économiques ne se sont jamais accompagnés d’une solution politique au conflit israélo-palestinien".

Ainsi, dès 2016, cette obsession des deux dirigeants pour les partenariats économiques souligne une réalité souvent négligée : la dissociation entre progrès économique et avancées politiques en période de guerre, puisque Trump pourrait envoyer plus d'armes à l'armée israélienne si la guerre était amenée à continuer jusqu'en 2025. En 2019, le plan Trump, évoqué par Bendelac, a marqué un tournant dans cette politique transactionnelle. "Le plan Peace to Prosperity, présenté par Donald Trump à Bahreïn en juin 2019" écrit Bandélac, "proposait 50 milliards de dollars d’investissements occidentaux dans les territoires palestiniens et les pays arabes voisins sur dix ans. Cela s'alignait étroitement avec la vision de Netanyahou de la paix économique. Ainsi, lors des quatres années où il fut président , les choix de Trump sur la question israélienne ont été caractérisés par une prédominance des intérêts économiques, et une tentative de normalisation des relations entre Israël et certains pays arabes contestant aujourd'hui la volonté israélienne d'intervenir à Rafah, et un soutien notable à la politique de Netanyahou, y compris dans ses aspects les plus controversés.

« Le soutien ferme de Trump a renforcé la popularité de Netanyahou, notamment au sein du Parti républicain américain, transformant le soutien à Israël en soutien constant depuis le 7 Octobre 2023 » affirme une source élyséenne. Quant aux décisions de Trump, de la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël en 2019 au retrait de l'accord sur le nucléaire iranien signé à Vienne, elles ont toutes été accueillies avec ferveur par Netanyahou, qui y voyait une validation de sa politique et une garantie pour la sécurité d'Israël.

Deux rois en Israel

Dans son essai intitulé consacré à Benjamin Netanyahou, Jacques Bendelac défend la thèse que le Premier ministre israélien a su tirer parti de sa relation personnelle avec Trump, qui serait un garant de la sécurité d'Israël. Dans ce contexte, les chiffres relatifs à la coopération militaire et sécuritaire prennent une nouvelle dimension. « Sous Obama, écrit Jacques Bendelac dans son essai, bien que les relations personnelles fussent tendues, l'aide militaire américaine à Israël a connu une augmentation notable. Cependant, c'est sous Trump que cette aide s'est cristallisée en un soutien sans précédent, se reflétant dans le budget de défense israélien ».

Le tournant de 2019 

Comme nous l'indiquent de nombreuses sources, Donald Trump a organisé sa collaboration avec Israël dans le cadre des élections législatives israéliennes de 2019, ce qui a servi les intérêts de Benyamin Netanyahou. "Il a mis tout son poids dans la campagne électorale pour favoriser la réélection de Netanyahou", écrit Bendelac, évoquant la reconnaissance par Trump de la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan comme un cadeau électoral stratégique pour le Premier ministre sortant. La symbolique de cette manoeuvre politique fut renforcée lorsque Netanyahou inaugura une colonie nommée Ramat Trump, honorant ainsi le président américain qui avait usé de son influence pour soutenir la politique nationaliste de Netanyahou. "La population juive du pays l’adorait comme son roi.", affirme Bendelac, citant Trump qui, sur les réseaux sociaux, n'hésitait pas à se prévaloir d'un statut quasi-divin en Israël. Toutefois, cette relation n'était pas sans risques ni controverses. La déclaration de Mike Pompeo en novembre 2019, annonçant que les États-Unis ne considéraient plus les colonies israéliennes comme illégales, a été interprétée par Bendelac comme le pinacle de l'approche ultra-partisane de Trump. "Cette annonce rompait avec plusieurs décennies de diplomatie américaine et de consensus", remarque Bendelac, signifiant un alignement sans précédent avec la politique de Netanyahou et un éventuel bouleversement de l'ordre diplomatique traditionnel. Enfin, l'entente entre Donald Trump et Benyamin Netanyahou semble être une danse complexe entre la politique et l'opportunisme. Elle reprendra de plus belle si l’ancien magnat de l’immobilier new-yorkais gagne les prochaines présidentielles. Quelques actes, comme la dénomination de la colonie « Ramat Trump » dans la province du Golan en Cisjordanie, sont des gestes de reconnaissance effectués par Netanyahou qui, selon Bendelac, "a voulu renforcer ses liens d’amitié avec le président américain".

 

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