Les Rangers, héros de la culture militaire américaine?

Les Rangers, héros de la culture militaire américaine?

Ce matin, le Président américain Joe Biden s’est exprimé depuis la Pointe du Hoc, un lieu emblématique où les Rangers américains ont joué un rôle crucial lors du D-Day.

Oscar Tessonneau

Boucherie

Nous sommes le 7 juin 1944. Il est environ 6 h 30 lorsque le débarquement débute. Les Américains sont positionnés sur les secteurs ouest, baptisés « Utah Beach», autour des dunes de Varaville sur la côte orientale du Cotentin, et « Omaha Beach», autour de Vierville, Saint-Laurent, Colleville et Port-en-Bessin. Les Anglais, dans les secteurs est, «  Gold Beach» et «  Sword Beach », jusqu’à l’estuaire de l’Orne. Quant aux Canadiens, ils se situent à « Juno Beach », entre les deux secteurs affectés aux Anglais. Débarqués les premiers, les hommes-grenouilles américains, présentés par le journal Ouest-France en 2023 lors du 79ème anniversaire du débarquement, dégagent les obstacles mis en place par Rommel : pylônes en acier, barreaux, hérissons et cônes en béton. Viennent ensuite les barges, chargées chacune d’une trentaine de soldats américains et de leur matériel. Souvent, elles flottent si bas sur l’eau que les vagues les recouvrent sans cesse. Le plus dur échoit aux Américains. D’abord Omaha Beach, une longue bande de sable et de gravier large de six kilomètres où, sur trente-quatre mille soldats débarqués le 6 juin, deux mille cinq cents laisseront la vie. Cet après-midi, dans son discours, Joe Biden a souligné le courage exceptionnel de ces 2500 soldats morts sur les plages. « Ils ont dû affronter l'immensité de ces falaises », décrit-il. Ce récit fait écho à celui de Franz Gockel, un soldat allemand présent à Omaha Beach, raconté dans le livre de Claire L’Hoër, Libération : la joie et les larmes : « Avec la marée, la mer s’était retirée de deux cent cinquante mètres. Beaucoup de péniches de débarquement avaient déjà été détruites par nos armes lourdes. Mais beaucoup d’autres s’échouaient sur le rivage. Les Américains devaient alors parcourir deux cent cinquante mètres de plage à découvert, ce qui leur était fatal. Malgré le feu nourri des canons doubles ou quadruples des barges, on tirait sur tout ce qui bougeait. La plage fut bientôt couverte de corps de soldats américains. Bien peu parvinrent au mur de graviers, à couvert. » Avec ses six canons d’une portée de dix-huit kilomètres, les Allemands balaient à la fois Omaha Beach et Utah Beach. Il est difficile de la prendre à revers car elle est protégée par un champ de mines.

L’Oncle Sam débarque

Dans son ouvrage, Claire L’Hoër écrit que le lieutenant-colonel James Rudder, dit « Big Jim », se propose de la prendre d’assaut avec deux cent vingt-cinq Rangers. « Il fallait en avoir dans le ventre pour escalader cette falaise ce jour-là », dira le général Eisenhower quelques années plus tard, lorsqu’il deviendra président des États-Unis. En rappelant ces événements, Joe Biden a également évoqué l’héritage de ces soldats, soulignant que leur courage continue d’inspirer les générations actuelles. « On peut imaginer aujourd'hui que les Américains feraient la même chose », a-t-il affirmé selon les journalistes du Parisien. Finalement, les Rangers parviennent au sommet pour découvrir, avec stupéfaction, que les six canons sont situés en retrait, à deux kilomètres. Cette surprise n’a cependant pas diminué l’héroïsme de leur exploit. La  Pointe du Hoc est restée dans la mémoire collective comme un symbole de détermination et de sacrifice. En effet, les Rangers américains ont dû escalader des falaises sous un feu nourri pour neutraliser les positions allemandes. Claire L’Hoër, dans son livre Libération : la joie et les larmes, décrit avec une précision poignante les difficultés rencontrées par les Alliés : « Ils réussissent à s’en emparer, mais au prix de cent soixante-quatorze tués ou blessés, soit plus des deux tiers de leur effectif. » Enfin, pour prévenir toute intervention aérienne allemande, les Alliés ont utilisé des ballons captifs sur les plages, une mesure de précaution importante étant donné l'importance stratégique des premières heures du débarquement. Claire L’Hoër écrit : « Pour empêcher les rares avions de la Luftwaffe de paralyser le débarquement, les Alliés élèvent sur les plages des ballons captifs reliés par des filets de câbles. »

Kieffer

Dans l'arrière-pays normand, la population locale était informée des opérations en cours par des messages radio de la BBC, une radio anglaise à partir de laquelle le général de Gaulle prononça l’appel du 18 juin quatre ans plus tôt. Derrière leurs micros, les chroniqueurs encouragent les civils à quitter les zones à risque pour éviter d'être pris dans les combats. L’historienne Claire L’Hoër écrit : « Dans l’arrière-pays, où le maintien du courant électrique permet d’écouter la radio, on tâche d’entendre les messages de la  BBC : Ici Londres… Ici Londres… Instructions urgentes du commandement suprême. La vie de beaucoup d’entre vous dépend de votre célérité et de votre obéissance immédiate. » La seule unité terrestre française invitée à participer au jour J est le commando Kieffer. Ce groupe de soldats français, entraînés par les Anglais en Écosse, avait pour mission de débarquer à Ouistreham et de neutraliser des positions allemandes cruciales. L’Hoër décrit : « Leur première mission dans l’opération Overlord consiste à débarquer à Ouistreham, au nord-est de Caen, à l’extrémité orientale des plages de débarquement, et à prendre à revers un bunker où un puissant télescope règle le tir de l’artillerie allemande, ainsi que le casino qui lui sert de PC. » L’Hoër écrit que Guy Vourc’h, membre du commando Kieffer, se souvient de cette épreuve : « Ces quinze jours passés à bord du navire qui nous emmenait vers les côtes françaises furent intenses. Nous savions que nous participions à un moment crucial de l'Histoire, mais l'incertitude régnait quant à notre destination exacte. Chaque nuit, nous nous entraînions à débarquer, répétant sans cesse les mêmes gestes pour être prêts le jour J. »  Ainsi, l’importance de ces commémorations va au-delà du simple souvenir historique ; elles servent à renforcer les liens transatlantiques et à rappeler les sacrifices consentis par les armées françaises et anglo-saxonnes pour préserver la liberté et la démocratie. Ces cérémonies, auxquelles participent des personnalités politiques de premier plan, illustrent la solidarité et la reconnaissance envers ceux qui ont donné leur vie pour un monde meilleur.

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