Faute de moyens, les psychiatres maltraitent leurs patients

Faute de moyens, les psychiatres maltraitent leurs patients

Samedi 4 mai, Caroline Coq-Chodorge, journaliste à Mediapart, démontrait que faute de moyens, et de soutien par des réseaux d’acteurs plus influents, les professionnels de la psychiatrie du utilisent des techniques de soins punies par la loi.

Oscar Tessonneau

"Nous n'avons pas le droit de faire ce que nous faisons."

"Tu es complètement fou. Ne prends plus contact avec moi." Tenus sur l’application WhatsApp par une collaboratrice de la sénatrice socialiste Laurence Rossignol, ces propos visant un ancien militant socialiste autiste, suivi dans une association de santé mentale (ASM) du sud de Paris, montrent que notre classe politique connaît encore mal l'ensemble des troubles du comportement pris en charge par les professionnels de la psychiatrie. Problèmes d’argent, manque de reconnaissance, les établissements médico-sociaux et psychiatriques doivent affronter de nombreuses difficultés, notamment lorsque des patients sont mis sous contention.

"Sous l’influence des manifestations psychotiques hallucinatoires et délirantes, les patients refusent souvent une hospitalisation. Ils ne se reconnaissent pas malades, ils se sentent persécutés par d’autres personnes ou par une ambiance, ils ressentent une insécurité fondamentale, ils ont peur d’être empoisonnés ou tués", explique Thomas Wallenhorst dans son livre Les troubles psychotiques. Ce sentiment de persécution complexifie considérablement l'admission et le traitement des patients que nous avons interrogés. Dans certaines structures ils sont pris en charge, comme l'hôpital du Mans s’est rendue la journaliste du site en ligne Mediapart, Caroline Coq-Chodorge, les urgences sont devenues le théâtre d'une pratique inquiétante : la contention prolongée des patients. Lionel Imsaad, chef des urgences, confiait à notre confrère de Mediapart : "Nous n'avons pas le droit de faire ce que nous faisons", révélant que certains patients sont maintenus en isolement ou attachés pendant des semaines, faute de places disponibles et de personnel suffisant. Le constat sibyllin de Lionel Imsaad est parfaitement juste. Il précise que ses équipes violent la législation française, qui encadre strictement l'usage de la contention et de l'isolement. Comme l’écrit Thomas Wallenhorst, les lois du 5 juillet 2011, du 27 septembre 2013 et du 14 décembre 2020 stipulent clairement que de telles mesures doivent être des solutions de dernier recours, contrôlées par le Juge des Libertés et de la Détention pour éviter toute violation des droits des patients.

Dernier recours

Cette situation est exacerbée par une pénurie criante de médecins psychiatres, que déplore la députée Insoumise de La Sarthe, Élise Leboucher : "Cela fait deux ans que je suis élue, que j’alerte (et je ne suis pas la seule), c’est le premier article de presse et rien ne bouge", nous indique avec stupeur la députée. Sa stupefaction est légitime, puisque la contention est un protocole violent. "Dans de rares cas, si l’état du patient nécessite des soins immédiats par exemple, le patient a fait une tentative de suicide grave ou il est admis dans un service des Urgences en raison d’une crise d’agitation maniaque ou délirante et s’il n’est pas possible de trouver un tiers, une hospitalisation peut être prononcée au titre du péril imminent sans tiers (SPPI)", écrit Thomas Wallenhorst. euvent parfois même plus fumer une cigarette.

Sortie prématurée

Wallenhorst écrit qu’avant d’acter une sortie, des professionnels de santé doivent se concerter. « Un collège de trois soignants doit se prononcer sur la pertinence de la poursuite de l’hospitalisation tous les six mois. Ce collège est composé d’un psychiatre participant à la prise en charge du patient, d’un psychiatre ne participant pas à la prise en charge du patient et d’un autre soignant (infirmier ou cadre infirmier)." Enfin, Wallenhorst écrit que la justice intervient également dans cette prise de décision.

« Un juge peut ordonner une alternative à l’hospitalisation complète ‘dans les 24 heures’. Lorsque des alternatives à l’hospitalisation complète ont été décidées par la justice, plusieurs solutions sont à la disposition des patients, lorsqu’ils veulent envoyer un patient dans un hôpital de jour." Il précise qu’après une contention, un patient peut fréquenter un hôpital de jour ou un CATTP (Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel) appartenant à un établissement de soins publics (EPS). Il indique que ces structures devraient avoir les moyens pour organiser l’hospitalisation d’un patient dont l’état de santé psychique se détériore. Cette intégration de services permet une prise en charge plus continue et adaptée, crucial dans des cas où la condition du patient peut fluctuer rapidement. Or, Caroline Coq Chodorge explique dans son enquête qu’au Mans, ces procédures ne sont pas toujours respectées. Comme elle l’indique dans son article, une patiente qui aurait dû être prise en charge dans un hôpital de jour s’est jetée sous un train, peu de temps après sa sortie de l’hôpital.

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